J’adore les hôtels.
Si ce n’avait été de ce désir très profond de famille en moi, j’aurais certainement pu passer la majeure partie de ma vie dans des hôtels. Y vivre sans me lasser. Jamais. En fait, c’est faux. J’aime trop la campagne et jouer dans la terre… Du moins, de septembre à mai, je pourrais m’y poser sans même me fatiguer du côté impersonnel que certains peuvent mettre de l’avant. J’aime me retrouver dans un décor et un autre fort différent le lendemain. Ainsi, j’aime la nouveauté. Non au sens du modernisme ou de l’originalité, mais bien au sens de l’expérimentation.
Il ne s’agit pas nécessairement d’une question de confort. J’ai dans mon sac plusieurs nuits de camping. Pas mal d’auberges de jeunesse aussi et je n’ai certainement pas fini. C’est une manière de voyager que j’ai toujours privilégiée, riche en rencontres et en apprentissages (notamment lorsqu’on prend le temps de cuisiner auprès d’autres voyageurs… que de savoureux moments!)
Je porte donc ces deux propensions qui diffèrent bien en moi. Pour m’agacer, Cafecito me surnomme la « Bourgitane ». Davantage bohème que bourgeoise, j’admets tout de même apprécier à l’occasion une nuit de sommeil sur un matelas moelleux tout en pouvant jouir d’un bain à l’italienne et du minibar à volonté… 🙂
Cafecito, c’est le papa de Roukie, notre fille. Mon beau compagnon de route aussi. Route qu’on ne partage pas toujours cependant. Pour paraphraser une chanson de la Rue Kétanou, nous allons toujours seuls sur la route, pourvu que chacune de nos routes se croisent un peu tous les jours …
Un brin bohème, dis-je.
J’aurais pu l’appeler mon homme ou encore l’Homme avec un grand « H » question de flatter un peu son ego, mais c’est un peu surfait. Je préfère l’affubler de ce surnom qui honore à la fois sa passion pour le café et notre passion commune pour les âmes latines. Depuis quelques années, j’essaie de lui transmettre le plaisir de voyager avec un sac à dos et de manière un peu plus spontanée. De son côté, il m’a fait comprendre que troquer celui-ci à l’occasion pour une valise à roulettes ne faisait finalement pas si mal que ça !
Travailler parfois à ses côtés et l’accompagner dans ces voyages me plaît. Seulement, je ne pourrais en rien me contenter de cela ! J’ai trop besoin de retrouver seule mon vieux backpack comme on aime retrouver une vieille paire de pantoufles. Me nourrir seule pour répondre à cette soif de moi-même qui se présente parfois avec avidité. C’est dans cette solitude, ou accompagnée de Roukie qui s’y fonde et la partage, qu’il m’est possible de faire ressortir mon côté sauvage et un peu plus aventurier.
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En préparation de mes prochaines pérégrinations, j’ai donc dû faire un petit saut de 24h à Québec pour le boulot. En proie à un intense besoin de me retrouver, je décide de délaisser l’auberge habituelle pour me payer le luxe d’une chambre bien à moi.
Ainsi, j’aime les hôtels. Et aujourd’hui, je jubile : bien que je la traîne pour ainsi dire partout, Roukie n’y est pas.
Dire que c’est extatique ne serait même pas exagéré: 24 heures rien que pour moi ! Sans couches, pleurnichements ou effets autres que les miens à transporter et à m’occuper.
Je n’aime pas particulièrement la ville de Québec. Plus calme et décontractée que ne peut l’être Montréal, elle me dérange par son trop-plein de touristes. J’ai de la difficulté à m’y fondre, à déambuler les rues en prenant quelques clichés sans ne me sentir illico catégorisée au rang de touriste écornifleur à mon tour.
Je n’y vivrais pas. Pourtant, j’aime bien m’y rendre une fois par année. Quand j’étais petite, l’attraction principale était le Simons. Maintenant qu’il y en a partout, je me contente de l’inimitable Ashton et du Casse-Crêpe sis sur la rue St-Jean. Les crêpes n’ont rien des succulentes crêpes que j’ai mangées en Bretagne, mais tout de même, elles s’en approchent. La crêperie étant exceptionnellement fermée, j’ai dû me rabattre dans un café, Tatum, sympa mais sans plus. Néanmoins, tout me semble absolument incroyable! La magie de savourer un brin de liberté… car au fond le panini n’est pas plus que correct, le service pressé et le « latte art » moyennement réussi. Cafecito aurait certainement de plus trouvé le lait trop chaud…
24 heures où il pleuvait à siaux.
La ville de Québec est d’autant plus laide sous un ciel grisâtre et lorsqu’elle a l’humeur maussade.
Et pourtant, j’ai parcouru les rues du Vieux-Québec, le sourire sur les lèvres et le regard pétillant, marchant dans la slush et prenant des clichés d’à peu près n’importe quoi. Peut-être n’y a-t-il qu’une nouvelle maman pour comprendre cette jubilation qui frise le ridicule. Québec est laide et moi je gambade !?
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La pluie tambourine sur la fenêtre de ma chambre d’hôtel.
C’est moche, maussade et franchement laid.
Je reviens d’un délicieux souper en tête-à-tête avec moi-même au Conti Caffè que je recommande vivement (le tartare de saumon se défaisait à la fourchette comme il se doit et le carpaccio de boeuf était succulent!). La facture était salée, mais peu importe, maman s’est gâtée…
À peine sortie de cette ambiance feutrée, je me suis tranquillement dirigée vers mon hôtel tout en jonglant avec mes rêves. Tout excitée, je me sens l’âge mental d’une petite fille de 8 ans.
Cette toute petite escapade me confirme dans mon désir de continuer à poursuivre le chemin un peu autrement. Après New York, le Mexique, un premier été à semer et récolter des légumes à St-Félix de Kingsey, la Gaspésie, un automne en Estrie, je me demande quoi offrir à Roukie pour élargir ses horizons. Et si c’était l’Amérique latine? Pourquoi pas le Panama ?
Tandis que je réfléchis à la faisabilité de mon projet, je prends en note à quel point une petite, bien petite, escapade suffit parfois à raviver la machine à rêves et à projets…
Une escapade comme une bouffée d’air. Vitale.
Alors que je tente de garder en tête qu’il est bien aisé de se mettre à l’écoute des peurs qui nous assaillent (surtout lorsque notre enfant grandit…), je savoure le luxe solitaire de ma chambre. Cherchant en moi cette petite dose de courage nécessaire pour continuer à tracer une route qui me ressemble.
Avec confiance.
J’avais déjà parcouru ton site à quelques occasions mais n’avais jamais pu m’y plonger vraiment, faute de temps. Voilà que par ce petit matin de congé pascal (qui ressemble drôlement à l’automne et nous donne envie de flâner en enfilant les cafés), je me laisse prendre par un premier texte, puis un autre, et un autre encore, et voilà que les perles s’enfilent sur le collier magnifique que tu crées sous nos yeux et nous distilles au jour le jour. Œuvre d’artisan ou d’orfèvre? Tes récits tiennent certainement des deux à la fois! Le style est épuré, précis, bien adapté au rythme des voyages et à la multiplicité des thèmes abordés. Il sert magnifiquement le propos et nous amène avec simplicité et efficacité au cœur même du sujet: la passion… Seule une relecture attentive permet de déceler l’écrivain accompli derrière la chroniqueuse, la fille méticuleuse derrière la bourlingueuse, l’âme sensible derrière la photographe assurée. Quel beau site! Quel beau travail! Bravo!
Ouf ! Je reste absolument coite devant ce généreux commentaire !
Profondément, merci !
Ça fait du bien, une telle tape sur l’épaule ! 🙂