Washington D.C. : fille de la mémoire

J’arrive tout juste de Washington.

Persuadée que j’allais rentrer déçue, j’admets être passablement surprise de ce que cette ville a laissé comme impression en moi. Je me sens bien mitigée.

Pennsylvania Street, vue sur le Capitole

Pennsylvania Street, vue sur le Capitole. À noter que la piste cyclable est au milieu de la rue

Évidemment, il n’y a pas de ruelles à Washington.  Que de grandes et trop larges allées.  D’emblée, de quoi me décevoir un tantinet.  De trop larges rues où il est impossible de se perdre ou de tomber dans un recoin méconnu.  Disons que la massivité de la capitale états-unienne et le fait qu’il n’y ait pas d’édifices construits en hauteur rendent encore plus cela improbable.  Moi qui adore déambuler dans une ville et me perdre !  Du moins, ses gigantesques trottoirs sont peut-être bien appropriés pour les touristes qui pullulent de toutes parts, vous me direz.

Si ce n’avait été de ce voyage de repérages en tant que guide-accompagnatrice pour des étudiants, je n’y serais sans doute jamais allée.  Loin d’être une destination alléchante à mes yeux, Washington D.C. évoquait pour moi tout ce que je déteste des États-Unis : la malbouffe, l’impérialisme états-unien, la mascarade, la massivité, l’artificialité, la malpropreté et les façades.

Finalement, c’est un peu un gros mélange de tout ça, la souillure en moins.  La ville est propre.  Indéniablement propre.  J’ai bien repéré quelques mégots sur le sol gazonneux du Mall, ce grand tapis de vert qui s’étale du Capitole jusqu’au Washington Monument, mais c’est franchement infime quand on pense à l’abondance de manifestations qui y ont lieu chaque année.

Washington D.C est aussi une ville qui est belle.  Indéniablement belle.

National Metropolitan Bank et magnolia

Pointez-vous le nez fin mars début avril et vous serez illico charmé par les centaines de cerisiers et de magnolias en fleurs qui côtoient une architecture néo-classique franchement superbe.  C’est loin d’être Rome (je réalise soudain que je n’ai pas vu une seule église dans la capitale contrairement à la ville italienne où il y en a plus de 400), mais les amateurs d’histoire et d’architecture seront certainement tout autant comblés.

Car de l’histoire, il y en a ! À profusion ! De quoi gêner et donner envie de se précipiter dans des livres pour réviser ses connaissances des premiers pas vers l’Indépendance et de ce qui en a suivi… Comment Jefferson, Lincoln et Roosevelt en sont venus dans mes souvenirs à faire plus qu’un seul et même homme ? Ouch ! Je vais certainement dépoussiérer prochainement mes vieux livres d’histoire pour satisfaire ma curiosité d’en connaître bien davantage.

Au premier abord, une impression d’irréalité vous traversera certainement en pénétrant le Mall.  Trop de musées imposants aux larges colonnes massives qui sonnent à première vue un peu faux et qui dégagent ce même « effet de carton » que les hôtels à Las Vegas.  Comme dans la ville affriolante,  cette même impression de se promener dans un décor de cinéma.  La chaleur du désert en moins cependant.

Néanmoins, cette sensation se dissipera rapidement lorsque vous réaliserez que cette ville met de l’avant une démesure qui est beaucoup plus sobre et qui n’a rien de l’exubérante New York ou du trompe-l’oeil las vegasien.

Contrairement à Vegas, Washington a de l’âme.  Beaucoup d’âmes.  C’est incontestablement une ville de la mémoire.  Et contrairement à Vegas, après 19h c’est une ville franchement morte où il ne se passe plus rien.

Un ami m’avait décrit la ville comme étant en elle-même un monument.  Son analogie me semble plus que juste et pertinente. Washington abonde en monuments commémoratifs, sculptures et mémoriaux gigantesques de toutes sortes, musées démesurés et bibliothèques dont la ville s’enorgueillit.  L’étendue et la pluralité de monuments commémoratifs est autant à l’image de la suprématie de l’empire états-unien que représentatif du dévouement un peu éperdu à cette nation. Fief de la culture et du savoir états-uniens, la ville s’est d’autant plus assurée la propagation de cette particularité : de fait, l’entrée pour la majorité des musées est gratuite !

J’écrirai quelques billets dans les prochains jours sur la capitale des États-Unis, surtout que je serai appelée à y retourner.  Cette ville regorge de sujets fascinants.  D’ici là, si vous n’êtes pas persuadé de trouver Washington belle, imaginez une balade à la tombée de la nuit.  Celle-ci vous convaincra.

Jefferson memorial

Près des mémoriaux magnifiquement éclairés, vous trouverez des dizaines de milliers de noms gravés à même la pierre ou le marbre.  Vous croiserez également des centaines de personnes silencieuses qui se souviennent.  Tout comme moi, vous poserez peut-être un tout autre regard sur cette nation que l’on se plait bien à détester.  Un regard un peu plus nuancé. Car dans l’air, il flotte incontestablement un profond respect.

Fille de la mémoire, Washington D.C. abrite en son sein un passé qui mérite d’être préservé et reconnu.  Aussi profondément respectueuse de ses morts, cette ville honore tour à tour la vaillance et le dévouement pour s’assurer que rien ne sombre dans l’oubli.

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