La fois où je n’ai pas dormi dans un igloo …

J’ai flanché.

Seulement trente minutes de marche dans la neige et je savais déjà que j’allais flancher.  Le vent glacial provenant du fleuve et la neige poudreuse m’avais exténuée.  Il faut dire que je souffre d’insomnie qui écourte considérablement mes nuits, mais n’empêche.  Il était seulement cinq heures, j’étais sur la majestueuse île d’Orléans et j’aurais dormi comme un bébé bien au chaud…

Pourtant, il y a cinq années, je n’avais pas hésité à passer près d’un mois dans les Rocheuses canadiennes, seule sous la tente à dormir en compagnie des ours, des coyotes et des grizzlis.  Néanmoins, outre le froid, l’igloo a ceci de différent dont il est difficile de faire abstraction :  le poids de la neige est certainement bien loin de celui d’une tente dans la possibilité où l’habitation s’effondrerait sur soi …

Étais-ce vraiment le froid ? Un sentiment de claustrophobie naissant ? Je ne sais plus.

Le matin, j’avais téléphoné à l’auberge afin de m’assurer qu’il y avait une chambre disponible au cas où.  Je sortais tout juste d’une vilaine grippe.  Et j’hésitais.

Puis lorsque je les ai vus, petits monticules de neige se confondant presque avec l’ensemble du paysage, j’ai compris que c’était loin d’être l’Hôtel de glace. Que les effets de lumière magnifiques (et surréalistes….) à même la glace qu’on voit dans les magazines y seraient absents.  Que ça s’approchait beaucoup plus de la réalité d’Agaguk que de celle du maire de Québec ou du Parc Jean-Drapeau … Finalement, qu’il y ferait noir.  Très noir.

Au souper, je me suis retrouvée attablé en compagnie de Marianne, Cécile et Vincent, trois Français fort sympathiques.  Cécile et Vincent m’ont raconté qu’ils venaient de perdre leur belle bête, un magnifique voilier dans lequel ils comptaient passer l’hiver dans les Caraïbes, quelques semaines plus tôt en Jamaïque.  Ils se sont fait avoir par les pluies tropicales. Sans mauvais jeu de mots, leur projet était pour ainsi dire à l’eau … Les aventures caraïbéennes des Grenoblois ont inévitablement pris un tout autre angle.

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– Alors on s’est dit pourquoi pas rappliquer au Québec et passer la nuit dans un igloo?, m’a lancé Vincent d’un ton qui tenait de la raillerie.

On pouvait tout de même y sentir une pointe d’amertume. Mais sagement, il remarqua qu’il était inutile de perdre ses énergies à fulminer contre la marina qui n’avait pas pris ses responsabilités et qui avait contribué à la perte du Hunter.

Je me suis rappelé que la vie était franchement drôlement faite et que notre force résidait certainement dans notre capacité d’adaptation aux imprévus. Arrêter de se prendre la tête et prendre un tout autre chemin parfois. Pour eux, il les avait mené cette année de la mer des Caraïbes à cet igloo.

Le soir-là, j’ai dormi bien au chaud dans une petite chambre tandis que je me demandais à quel moment de la nuit la triade allait rappliquer dans le dortoir de l’auberge.

Je les ai retrouvé le lendemain au petit déjeuner. Ils étaient frigorifiés, mais ils avaient passé la nuit complète dans leur igloo.  Cécile avait un peu mal à la gorge, Marianne n’avait presque pas dormi et Vincent avait le dos entier complètement transi.  Le temps ressenti cette nuit là était de plus de -25 degrés.

Chapeau bas !

C’est une très belle leçon de tenacité et de courage que m’ont donné ces trois, ou presque, sexagénaires ce matin-là… 😉

**

Je me suis promis d’y retourner.  Chaudement emmitouflé.  Auprès d’un Agaguk serait encore mieux …

Et parce que l’île d’Orléans, en toute saison, c’est magnifique …

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2 commentaires pour La fois où je n’ai pas dormi dans un igloo …

  1. Sylvain dit :

    Tu as flanché ??? Et puis ? Tes conditions n’étaient pas vraiment idéales. Quant à tes amis français, il est facile de voir qu’il manquait quelques pièces d’équipement qui auraient rendues cette nuit si douillette.
    Faut dire que ces commentaires viennent d’un gars qui a un côté « ours » assez fort et un peu de sang Attikamek. Donc, aucun mérite pour moi.

    Tu vas probablement te reprendre 😉

    • Mawoui dit :

      En fait, je réalise que normalement je me tape beaucoup sur la tête lorsque je ne réalise pas quelque chose …

      Et puis, finalement, je me dis que je n’ai absolument rien à prouver et que c’est franchement pas plus grave que ça ;-)si j’ai à me reprendre, ce sera dans de meilleures conditions, effectivement !

      L’ours en toi a vu juste : ils avaient effectivement plusieurs suggestions quant à l’équipement qui n’était pas totalement adéquat !!

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