Tout comme le cordonnier mal chaussé, j’ai réalisé dernièrement qu’on pouvait être par moment très mauvais guide chez soi… Il y a certes nos endroits incontournables qu’on aime partagés, les coups de coeur propres au quotidien de chacun dans notre environnement immédiat, là où l’on va bruncher le dimanche matin ou encore prendre une pinte de bière accoudé au bar en discutant avec le barman le jeudi soir. Mais il y aussi ces endroits parfois dits touristiques que l’on croit connaitre et qu’il est bon par moment de redécouvrir avec un nouveau regard…
Montrez-moi un panorama new-yorkais, je n’aurai aucun mal à y repérer le Chrysler Building, le Ge ou le Hearst Magazine Building. Du JFK Library à Boston, je distingue aisément la Prudential Tower du Hancock Place. Même aisance pour vous parler des architectes, ces « archistars », qui ont contribué récemment au plan de restauration de la ville de Toronto. À Washington, aucun problème pour vous parlez de long en large des divers mémoriaux en vous donnant un petit cours d’histoire et de politique états-uniennes. Mais là, vraiment, dans ma propre ville, j’ai eu la honte.
C’est en haut du Belvédère du Parc du Mont-Royal en compagnie d’une copine blogueuse française, Sarah du blog du même nom, que j’ai réalisé à quel point je méconnaissais ma propre ville par endroit. Non seulement, j’ai confondu la Place Ville-Marie avec le 1000 de la Gauchetière, j’ai hésité entre le pont Victoria et le Pont Mercier pendant quelques secondes, mais, outre la Place Desjardins aisément discernable à cause du sigle à l’effigie de ma caisse, j’arrivais bien mal à nommer les édifices constituants le centre-ville montréalais. Pour ajouter au tout, c’est Lucie, ma copine photographe française, et installée ici seulement depuis quelques années, qui palliait à mes hésitations … Ouain !
À ma pauvre défense, Montréal je l’ai a priori apprivoisée sous ses airs festifs, de nuit et à l’aube durant plusieurs années. Boulots de barmaid et de serveuse obligeaient, c’est Montréal la sauvage et sans limites que j’ai d’abord connue. Montréal et ses sympathiques chauffeurs de taxi, ses autobus de nuit remplis à craquer et ses rues bondées où il fait bon de danser lors des festivals. Montréal et sa rue Saint-Catherine avec sa vie étudiante éclatée, là où j’allais parfois suivre mes cours universitaires de communication et de littérature, le sourire en coin, en haut d’un sex shop et devant un bar de danseuses. Montréal et ses salles de spectacles que j’ai aimées même lorsqu’elles étaient enfumées. Montréal et ses quartiers. Et ses vies de quartiers. Et surtout, Montréal et ses ruelles que j’ai toujours aimé follement parcourir la nuit.
Montréal et ses lieux pour reconnecter aussi : le parc de l’Île-de-la-Visitation où je vais régulièrement marcher avec ma fille, le marché Jean-Talon (en semaine s’il-vous-plait !) pour faire le plein d’odeurs et de couleurs selon les arrivages et les saisons, Montréal, ses terrasses et ses superbes bières de microbrasseries artisanales. Montréal et les Portugais du quartier Villeray qui balaient chaque jour les trottoirs comme s’il s’agit du centre du monde…
Et le Montréal que j’ai détesté, si près de mon chez moi actuel, mais dans son recoin trop résidentiel et plus près d’une pseudo banlieue mal assumée, alors que je n’avais pas encore effectué le deuil de ma vie de quartier …
Et puis voilà, il y a aussi ces lieux qu’on oublie. Qui sont là depuis des lunes, juste à côté, et où on ne prend pas trop soin d’aller voir ce qu’on pourrait y trouver. Ainsi, en est-il du Parc du Mont-Royal, littéralement un immense boisé qui nous coupe de cette sensation de ville et qui nous ramène à chaque fois un peu plus près de soi. Le Montréal que l’on fuit, avec ses rues trop branchées lors du Grand Prix ou ses restos un brin dispendieux de son Vieux-Port. Celui trop à l’Est ou à l’Ouest et que l’on néglige de découvrir avec ses parcs et magnifiques points de vue sur le fleuve.
Cet été, je me propose donc de sillonner mon Québec, mais aussi d’apprivoiser autrement ma ville. Là où j’ai posé mes pénates et où je m’ancre de plus en plus. Tandis que je laisse doucement se tapir cette envie d’Asie naissante et la laisse mûrir avant d’y répondre, je ralentis le pas et ouvrirai les yeux pour regarder autrement tout autour de moi …
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Mise à jour mars 2014 : J’ai depuis grandement approfondi mes connaissances de Montréal 😉 J’y accompagne parfois des groupes pour leur partager ma passion de ma ville.
ah si tu savais comme je me rends compte que je connais mal Paris aussi… et c’est souvent quand des amis de passage sont là que je m’en rends compte! en tout cas, c’était vraiment top le parc du mont royal… et ça a l’air cool le pub ste elizabeth!! faut vraiment que je revienne! bises
Absolument, il faut que tu reviennes ! J’aurai le temps de me libérer et d’organiser un vrai programme ! Le Pub Ste-Elizabeth, c’est là où j’ai flambé mes payes au début de ma jeune vingtaine ;-). Un beau Pub avec d’excellentes bières et parfois de petits bands de jazz (du moins à l’époque) sur sa terrasse arrière avec de hauts murs couverts de lierre.
Je te lis de Lyon et suis relié à Montréal. Merci 😉 PS : moi aussi en envie d’Asie 🙂
Je porte toujours Lyon dans mon coeur 😉 Et les Lyonnais sont les français qui me font bien souvent le plus penser aux Montréalais.
Chouette cette envie d’Asie hein ? Pour moi, c’est réellement nouveau, j’ai le sang tellement davantage latin … Et bien que j’ai des tonnes d’amis qui y soient allés, ce désir et cette curiosité sont réellement apparus que par Martin Léon et son superbe spectacle. Peut-être parce qu’il me l’a introduit autrement, sous l’angle de la création et ça me parle encore plus … https://mawoui.com/2013/01/17/sur-la-route-de-la-creation-avec-martin-leon/
Une série vidéo sur différents quartier de Montréal
Tiens justement, on y parle de mon quartier dans celui-ci http://youtu.be/5LdT410suUE
Au retour de vacances, projet de shoot de nuit: Montréal by night en tour de l’île 🙂
C’est donc bien chouette ces petits topos ! Merci, très instructifs en plus !
Beau projet !! Si t’as besoin d’une assistante, d’un autre regard ou une plume, je suis partante 😉
D’ici là, profite bien de la Belgique et d’Amsterdam ! Je t’envie, des moules, des frites et de la Chouffe ! Mmmm !!!
Et je te dis ça comme ça, mais j’ai toujours rêvé d’une image de la Tour de Bruxelles d’Eric de Ville … Hihi ! 😉
Quel texte intéressant! C’est bien vrai que nous oublions (ou sous-estimons) souvent les attraits de notre propre région… Voyager et découvrir de nouveaux paysages est fantastique, mais il faut également savoir profiter des endroits qui se trouvent tout près. Redécouvrons notre métropole, avec son côté parfois européen, parfois américain… et surtout très éclectique! 🙂
🙂
Elle est souvent galvaudée à gauche et à droite cette phrase sur plusieurs sites, mais j’y ai tout de suite pensé après lecture de ton commentaire. …
« Le véritable voyage de découverte ne consiste pas à chercher de nouveaux paysages, mais à avoir de nouveaux yeux. »
À ce Proust, il aura laissé quelque chose de beaucoup plus grand que sa recherche du temps perdu …
Bravo, grâce à toi la nostalgie me prend ! À bientôt !
Merci ! Tu es rendu où sur la planète ces jours-ci Johann ? Pas tout de suite en Birmanie ?
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