Je déserte quelque peu l’univers de la blogosphère depuis quelques semaines … M’en voulez-vous ?
Ça vous arrive par moment ce besoin, profond le besoin, presque viscéral, de couper pour un moment les ponts avec les gens autour de vous ? Se nourrir que de soi ? Une soif de soi-même comme une urgence ?
Bien qu’en général de tempérament assez sociable, j’ai toujours eu en moi cette propension farouche et sauvage qui est là, tapie quelque part, et qui peut ressurgir à tout moment sans que je ne m’en aperçoive. Plus je tente de la refouler au loin, plus elle devient criarde.
J’aime me plaire à croire que nous sommes tous un peu ainsi. Qu’un moment, une parole précise, une lassitude grandissante, un sentiment de tourner en rond ou encore une impression de trop-plein se présente subrepticement et puis, soudain, tout se met à dérailler autrement. Isolement, fatigue, colères exacerbées, désir de nature et d’espaces ouverts, verts de préférence, se pointent le bout du nez et se présentent en urgence, clamant leur absolue nécessité…
Ces symptômes féroces et épisodiques me traquent bien plus souvent qu’à mon tour. Et soudain je me réveille, au pied du mur, essouflée, vide et esseulée, ou encore pleine et envahie, cherchant tant bien que mal une tanière pour penser mes plaies et mes émotions fourbues.
La « dynamique de l’éponge », c’est assez commun comme explication. Quelques jours de solitude (ou d’isolement, c’est selon) où je frôle alors la crainte de m’être choisie, la culpabilité de ne plus y être, la peur qu’on se lasse de moi et de mon besoin implacable auquel je ne peux plus me soustraire. Par moment, j’aimerais bien être une passoire… ou un filtre. Du moins, assez forte pour tout laisser glisser, ne rien retenir et surtout ne pas m’y enliser.
Encore aujourd’hui, cette soif de moi-même se présente avec avidité. Et je ne sais plus trop qui de la sauvage, de l’hypersensible, de l’enfant blessée ou de la femme esseulée clame ainsi d’être écoutée…
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Je sais que mon amour profond pour le voyage et l’ailleurs va exactement en ce sens : bien avant de tendre vers l’autre, il est en quelque sorte profondément égoïste. Il répond d’abord autant à un désir de fuite qu’à un besoin de se retrouver, seule au monde et à la fois absolument entière dans le regard de l’autre. Pour moi, je l’ai appris un peu par hasard, c’est bien souvent dans le regard d’un inconnu qu’il m’est possible d’entreprendre ce voyage intérieur et solitaire. S’y dévoiler. Et s’y confondre. Car le regard de l’inconnu est sans attente. Et c’est en dehors de toute attente qu’il est possible de retrouver son pas, créer sa propre cadence, tracer sa route. Définir et redéfinir une quête qui nous est propre.
C’est drôle, ce besoin d’aller vers moi qui tend de plus en plus vers vous …
Vous, des inconnus, pour la plupart.
Oh damn, je me sens comme ça moi aussi. Exactement. Pis j’étais justement en période de réflexion sur le sujet.Merci.
« Et c’est en dehors de toute attente qu’il est possible de retrouver son pas, créer sa propre cadence, tracer sa route. »
Que c’est beau!
Ces quelques mots révèlent à la fois beaucoup de douleur et de lucidité. Quand l’un et l’autre se conjuguent ainsi, c’est souvent le premier signe qu’une transformation s’opère déja en nous. Comme le chrysalide de Gide, prélude essentiel à une grande libération.
Jean-Louis